Attaques contre la police- Katiola, Duékoué, Bouna et Yamoussoukro, 5 blessés, des morts et silence
Les attaques contre les forces de l’ordre se multiplient sans réaction probante des autorités. Simple défiance à l’autorité policière ou autre chose ?
Le lundi 3 octobre dernier, la paisible cité de Katiola au Centre-Nord du pays était secouée par une violente manifestation contre les policiers à la suite de la mort d’un jeune homme, un renégat de la pègre en deal avec des ripoux.
Résultat de la défiance à l’autorité policière, l’incendie du commissariat, le saccage de domicile d’un officier et une « fatwa » pour le remplacement pur et simple de l’ensemble du personnel de la police. Ainsi décidé et exécuté pour apaiser les esprits, l’Etat met lui-même à mal son autorité.
Au moment où les cendres du commissariat de Katiola n’étaient pas encore éteintes, Duékoué est signalé sur les écrans radars. La population a attaqué le commissariat. Là encore, silence radio des autorités face à ces essais concluants d’une population qui, depuis la crise du 19 septembre 2002, tient tête aux forces de sécurité.
Le processus de désarmement, démobilisation et réintégration ou réinsertion (DDR) a, selon les autorités ivoiriennes, été un satisfecit. 37942 armes ont été officiellement collectées par les forces régulières. 69506 ex-combattants ou associés ont rendu des armes sur une liste potentielle de 74000 individus attendus des différents camps en belligérance (ex-FN, ex-combattants associés aux ex-FDS, milices pro-Gbagbo, mercenaires).
Pour Aline Leboeuf, chercheur à l’IFRI (France) qui a publié un ouvrage sur « la Réforme du secteur de la sécurité à l’ivoirienne » en mars 2016, « si la situation sécuritaire s’est grandement améliorée depuis 2011, des incidents ont toujours lieu ponctuellement et conservent un potentiel de déstabilisation qui justifie un effort continu de réforme du secteur de sécurité ».
Elle ne croyait pas si bien dire tant les germes d’une volonté d’engager des bras de fer avec les forces de l’ordre sont manifestes et s’expriment sur le terrain.
Ce mercredi 16 novembre et encore ce jeudi 17 novembre matin, c’est la capitale politique ivoirienne qui a été le théâtre d’une tentative insurrectionnelle contre le commissariat du 2è arrondissement de Yamoussoukro au quartier Dioulabougou.
Contactées par Politikafrique.info, deux sources sécuritaires rapportent que « un jeune du quartier a été raflé. Sa tentative de fuite par saut hors du véhicule croise sur le macadam la route d’un véhicule qui lui monte dessus. La police l’a rapidement conduit aux urgences mais il est décédé à la suite de ses blessures. En représailles, ses camarades, armés de gourdin, de bois et autres armes blanches ont lancé un assaut contre le commissariat jusqu’à 2h du matin » confie un des officiers. Et l’autre de renchérir que « les tirs entendus étaient des tirs de dissuasion mais ce matin ils ont tenté un nouvel assaut ».
Sur place, une source civile contactée par Politikafrique.info confirme le saccage du commissariat, « incendié » par endroit par les jeunes révoltés et toujours « avec des gourdins ».
Mais, elle assure que « un renfort de la CRS est arrivé et la situation est sous contrôle actuellement ». Jusqu’à quand va-t-on donc assister à cette défiance de l’autorité policière ?
A Yamoussoukro, cinq agents de la police ont été « légèrement blessés » par les assaillants.
Un chauffeur de taxi à Abidjan indique à Politikafrique.info que « il y a quelques jours, un chauffeur de gbaka (minicar de transport en commun à Abidjan) a administré une gifle retentissante à un policier qui voulait le racketter ».
S’il est vrai que nul n’admet et ne défend quel que agent que ce soit dans la pratique du racket, le code pénal punit quiconque porte main à un agent dans l’exercice de ses fonctions par l’article relatif à la « rébellion ».Malheureusement, cette habitude tend à prendre le dessus dans la société ivoirienne. Il n’y a qu’à faire un tour à la gare routière centrale d’Adjamé, Gbèba, contrôlée par une mafia sans nom, pour se rendre compte que l’autorité n’a plus de sens.
Ce laisser-aller a conduit à la mort par arme blanche de deux jeunes gendarmes et un militaire blessé à Nianmoin, dans le département de Doropo, à l’Est du pays.
Il est vrai que les policiers sont cités souvent comme des réfractaires aux consignes de bonne conduite par des actes de racket et autres. Mais, cela ne saurait donner lieu à de la défiance à l’autorité incarnée.
Selon un « ancien » flic, qui a accepté d’analyser cette situation délétère pour Politikafrique.info, les coupables sont identifiés. Ce sont « les enseignants qui cherchent des soutiens pour leur grève, c’est le mécontentement général des militants du RHDP face aux choix opérés pour les législatives à venir et la manipulation de la jeunesse par des hommes politiques ».
Et de conclure que « l’ivoirien est devenu violent.»
Comment sortir de cet engrenage ? Reprendre la main par une discipline au sein des forces de l’ordre et mettre en garde la population civile contre les actes de défiance à l’autorité de l’Etat. Car, trop c’est trop !
Adam’s Régis SOUAGA
Source : Politikafrique.info